C’est une véritable prouesse réussie par nos Préfets.
Cette saison, plus de 100 rencontres de football en France ont fait l’objet d’un
arrêté préfectoral d’interdiction totale ou de restriction (nombre limité,
horaires imposés, modes de transports imposés, points de rendez-vous
imposés) de déplacements de supporters.
Environ une rencontre de football professionnel sur huit.
Et ce, sans compter le nombre de rencontres dont les dates et les horaires ont été allègrement modifiés unilatéralement et souvent à quelques jours des matchs par les Préfets.
En 9 ans, ce sont plus de 600 rencontres qui ont fait l’objet de telles mesures.
Ce chiffre démesuré et la récurrence de ces mesures sur une décennie ne démontrent qu’une chose : les supporters de football ne sont pas des citoyens à part entière.
Ces mesures privatives de libertés ne sont en réalité qu’une solution de facilité des Préfets pour démissionner de leurs devoirs républicains. Dans leur esprit, « ce n’est que du football ». Rien qui ne mérite de se donner la peine d’assurer la sécurité de ces moments de partage, de collectivité, de fraternité, de passion, de lien social. Car « ce n’est que du football ».
Aujourd’hui, « ce n’est que du football ». Demain, ce ne sera que « le droit de manifester », « le droit de se réunir », « le droit de s’exprimer », « le droit d’aller et de venir ». Si l’on admet qu’il est normal de priver certains citoyens de leurs libertés, pourquoi pas les autres ?
L’exaspération est légitime. Elle frémit. Ce n’est que grâce au sens des responsabilités des associations de supporters que cette exaspération n’a pas conduit à l’ébullition. Car cette hypocrisie et ce mépris de la République pour 12 millions des siens sont une honte nationale.
Messieurs les Préfets, il est de votre devoir de retrouver vos esprits et de vous souvenir que vous représentez la France. Votre recours hebdomadaire à ces arrêtés n’est que source de tension à l’heure même où les acteurs du football français ont fait le choix du dialogue constructif et productif.
Pourquoi ainsi gâcher les belles réussites et les belles promesses de l’Instance Nationale du Supportérisme, par exemple avec l’expérimentation des tribunes debout ? Pourquoi ainsi gâcher les efforts de la LFP, sous la houlette de Mme Boy de La Tour, pour remplir les stades (grâce au tarif unique en parcage visiteurs) et améliorer les relations entre les supporters et leurs interlocuteurs (par le déploiement de référents-supporters dans chaque club professionnel) ? Pourquoi ainsi parasiter les travaux menés par tous ces acteurs sous le parrainage de la Fondation Nivel pour déconstruire les tensions entre supporters et forces de l’ordre ?
Le dialogue n’a jamais autant porté ses fruits au niveau national. Vous en êtes les fossoyeurs au niveau local. Messieurs les Préfets, prenez vos responsabilités.Les supporters ne sont pas des barbares prêts à mettre la France à feu et à 100. Ils sont des citoyens. Comme vous.